CHEVEUX LONGS INTERDITS

 

Agnès était vraiment excitée par ce voyage, premier voyage en Afrique. Elle se rappelait de quelle manière elle avait sauté de joie lorsque son amie Catherine l’avait invitée pour les congés de Noël. Les deux amies se connaissaient depuis bien longtemps et avaient fréquentés ensemble les bancs de la fac de sciences de Lyon. Agnès travaillait à Paris dans un laboratoire privé et Cathy avait trouvé son bonheur dans la Coopération, elle était depuis 6 mois à Djibouti.

 

A présent dans cet avion d’Air Afrique, Agnès savourait le plaisir d’être dorlotée par le personnel de bord. Connaissant la légendaire chaleur de ce coin de l’Afrique, elle avait adapté sa garde-robe pour la circonstance. Elle se trouvait très « exploratrice » dans son bermuda de toile beige, et portait dessus un débardeur de coton qui moulait parfaitement sa jolie poitrine. Elle avait attaché ses longs cheveux noirs en une queue de cheval relevée sur elle même et tenue par une barrette. C’était à la fois pratique et faussement négligé à souhait.

 

Elle était impatiente d’arriver, et relisait dans sa tête la dernière lettre de son amie, pleine de recommandations diverses, telle une vraie mère poule. Un point particulier l’intriguait néanmoins……..   « ….et surtout penses à te faire couper les cheveux avant de venir……. »

Agnès n’avait pas compris ce détail et ne se rappelait pas que Cathy lui ai parlé de cela avant pour lui fournir une explication. De toute façon elle n’en avait pas tenu compte et il aurait vraiment fallu que la loi le lui impose pour qu’elle se coupe les cheveux. Ses origines eurasiennes lui avaient fait hériter d’une peau couleur de miel et de magnifiques cheveux noirs aux reflets bleus qu’elle gardait longs sur le dessus du dos, et qu’elle entretenait très régulièrement.

 

L’arrivée à Djibouti fut un véritable choc. A peine passé la porte de l’appareil, elle fut saisie par la moiteur de l’air et l’impression véritablement de se trouver face à un gigantesque sèche cheveux en marche. La passerelle amenait directement sur le tarmac et il fallait se rendre à pied au terminal arrivée. Les quelques dizaines de mètres entre l’avion et l’aérogare avaient suffit pour mettre Agnès en nage, et elle fut contente de trouver la fraîcheur relative de l’aire à bagage. Elle regardait en tous sens pour essayer de voir le visage familier de Cathy, mais tout était très cloisonné et elle ne pouvait espérer la voir qu’après avoir passé la douane. Elle trouva enfin sa valise et faisait la queue pour passer le contrôle. Il y avait partout des soldats armés et des hommes en costume à la mine peu engageante. A son tour elle posa sa valise sur le comptoir et présenta son passeport. Le soldat jeta à peine un coup d’œil sur le contenu de la valise mais fit un signe de tête au douanier en désignant les cheveux d’Agnès.

_ «  Les cheveux……Il faut les couper. Ici pas de cheveux longs. Interdit »

Agnès avait l’impression d’avoir mal entendu :

_ «  Qu’est ce que vous voulez dire ? Les cheveux longs sont interdits ? Mais c’est absurde !

_ C’est la loi. A cause de l’eau. Passez derrière et suivez moi sans histoires » Aussitôt l’un des militaires fit basculer son arme qu’il portait à la bretelle et s’avança vers Agnès. La peur instinctive envahit l’esprit d’Agnès, l’empêchant de réfléchir. Elle se laissa conduire, passa le comptoir, et aperçu sur la droite les toilettes dont la porte était grande ouverte. Un siège de coiffeur y avait été placé et une jeune femme en uniforme attendait, une tondeuse à la main. Agnès fut prise de panique elle voulu retourner vers le comptoir mais le chemin était bloqué par le soldat. Elle se mit à crier, et comme elle allait se débattre dans les bras du douanier elle entendit la voix de Catherine : « Agnès ! Attendez, attendez ! Je suis une amie, je réside ici ! »

 

Et tout s’arrêta….Agnès reprenait ses esprits elle se sentait sauvée, ses jambes avaient du mal à la porter. Catherine était à présent en plein palabre avec douaniers et militaires, montrant son passeport, sa carte de travail, une lettre de l’ambassade de France, son badge du Centre National de Recherches. Enfin après un quart d’heure les deux jeunes femmes se retrouvèrent sur le parking de l’aéroport, et tombèrent toutes les deux dans la voiture débâchée de Cathy, épuisées comme après un footing.

_ « Bienvenue à Djibouti ! toujours aussi tête de mule, je t’avais avertie pour les cheveux non ?

_ Oui je me rappelle ta lettre mais je croyais que tu disais cela à cause de la chaleur. Qu’est ce que c’est que cette histoire de loi interdisant les cheveux longs ? C’est la Chine de Mao ici où quoi ?

_ Pas tout à fait, mais le nouveau régime depuis 10 mois essaie de redresser le pays de façon très autoritaire. La dernière loi date d’un mois et concerne justement la préservation de l’eau, et c’est entre autre pour économiser l’eau qu’ils interdisent depuis les cheveux longs.

_ Mais c’est vraiment absurde !

_ C’est la loi !

_ Tu leur as dis que j’étais une touriste pour 10 jours et ils ont compris j’espère…

_ Pas tout à fait….Je leur ai promis que dés demain tu aurais les cheveux coupés. Je ne voulais pas te laisser aux mains d’une douanière sauvage. » Tenta-t-elle pour essayer de dédramatiser.

_ « C’est pas vrai ?…..Mais demain ils n’y penseront plus, hein ? Personne ne va venir voir si j’ai encore les cheveux longs, si ?

_ Ne t’y trompes pas, il y a ici plus de militaires, de flics et d’indics que sur tout le reste du continent. S’ils ont donné un délai, ils viendront vérifier à l’expiration du délai…. Mais ne t’inquiètes pas, on va aller voir ma coiffeuse. »

Agnès était épuisée, elle soupira complètement résignée, vaincue. Elle n’avait même plus de goût à découvrir la ville si pittoresque, l’ancien palais du gouverneur, le port, les minarets…Arrivées sur une petite place cernée de commerces très « européanisés » Cathy gara sa méhari et tout à coup sembla complètement effondrée. Le salon de coiffure était fermé. Elle regarda sa montre.

_ « Les choses se gâtes ma puce..

_ Voyons ce n’est pas grave, demain à la première heure il ne sera pas trop tard. Ils ne vont quand même pas venir à l’aube comme s’il s’agissait d’arrêter la bande à Bonnot »dit elle en retrouvant le sourire.

_Non mais demain c’est vendredi, et vendredi dans un pays musulman, c’est comme dimanche chez nous tu vois ?

_ Et bien ainsi je garderais mes cheveux longs un jour de plus.

_ J’espère….. »Lâcha Cathy un peu soucieuse.

 

Le lendemain de bonne heure les deux amies se rendirent à la plage. Les soucis de la veille étaient presque oubliés et les deux jeunes femmes se laissaient enfin aller aux joies des retrouvailles, des vacances et de la mer chaude. Sur le chemin du retour elles s’arrêtèrent dans un restaurant de poisson et ne retrouvèrent la maison que pour l’heure de la sieste. Agnès se laissa aller sous la douche et Cathy dû lui rappeler les consignes pour l’eau. Mauvais souvenir….Mauvais présage….A 16heures on frappa à la porte.

_ « Bonjour ma’ame, Sûreté Nationale » Cathy senti son cœur battre plus fort, ils venaient pour Agnès. Elle hésita un instant à mentir, à dire qu’elle n’était pas là, mais ils fouilleraient la maison et les ennuis cette fois seraient bien plus sérieux s’ils se sentaient abusés. Elle fit une grimace ;

_ « Que puis je pour vous ?

_ Nous voudrions voir mademoiselle Agnès Marchand » A ce moment là Agnès entra dans la pièce et voyant les deux hommes en costume elle compris toute de suite.

_ « Ecoutez, je vais vous expliquer, mon amie a bien essayé de faire comme elle avait promis mais c’est à cause du vendredi, vous comprenez….. » Cathy lui pinça le coude et fit les gros yeux à son amie pour lui faire comprendre de ne pas s’aventurer sur ce terrain là.

_«  Veuillez nous suivre je vous prie » Sans rien prendre Agnès se laissa embarquer par les deux flics, sans voix. Cathy allait se précipiter pour les accompagner mais l’un des policiers lui fit signe de rester là où elle était. Malgré tout Cathy pris sa voiture et suivit le 4X4 de la police jusqu’au commissariat où bien sur on ne la laissa pas entrer.

 

L’endroit était sordide, tout semblait sale. L’entrée était occupée par un bureau métallique derrière lequel un fonctionnaire était avachis. Agnès fut conduite plus loin, au bout d’un couloir, on la fit entrer dans une cellule dans laquelle il n’y avait aucun mobilier. Le plafond était remplacé par un grillage, la cellule était « à ciel ouvert ». Elle s’appuya au mur, regardant le ciel elle se mit à trembler, et sentait des larmes lui monter au visage. Plus d’une heure après on vint la chercher et la conduire devant le bureau métallique. On lui fit signer des papier et soudain Agnès crut comprendre qu’on voulait simplement lui infliger une amende. L’espoir revenait, elle était prête à payer bien sur, oui, tout ce qu’ils voudraient…Le dernier papier signé, elle se sentait respirer de nouveau.

_ «  C’est bon ? Je peux partir ?

_ Bien sur petite madame…. Une dernière formalité avant de vous libérer. » Le grand flic tenait Agnès par le bras et lui fit faire demi-tour. Ils avancèrent dans un autre couloir qui menait à une cour intérieure. Agnès avait le cœur dans la gorge. Non….ils n’allaient pas faire ça ? Elle hurla et la poigne du flic se fit plus ferme lorsqu’ils pénétrèrent dans la petite cour. Au centre, sur le sol cimenté se trouvait un tabouret de bois et à coté du tabouret une grosse femme en uniforme de la police, l’air sévère, la tête rasée. Le policier força Agnès à s’assoire sur le siège de bois et lui maintenait fermement les poignets alors que la matrone avait déjà saisi ses cheveux.

_ « Nooooon S’il vous plait non ! » Agnès pleurait cette fois ci pour de bon. La grosse femme soulevait les cheveux d’Agnès derrière l’oreille et soudain le vrombissement de la tondeuse électrique résonna dans la petite cour. La lame de la tondeuse se posa sur la peau d’Agnès juste derrière l’oreille droite et commença à remonter vers le sommet. Le bruit de l’appareil changea dés que les lames attaquèrent les cheveux. Au changement de rythme Agnès devinait le parcours de la tondeuse. La grosse femme passait la tondeuse sur la nuque à présent, remontant jusqu’au vertex, d’énormes mèches de cheveux glissaient jusqu’au sol, et bientôt le tabouret fut entouré d’une masse noire aux reflets bleutés. Saisissant les cheveux sur le sommet de son crâne, la femme policier fit relever la tête d’Agnès et posa la tondeuse sur le front, puis la fit glisser vers l’arrière, un passage, puis deux , puis trois, les lourdes mèches dégringolaient dans le dos d’Agnès. A présent la tondeuse glissait sur la tempe toujours du bas vers le haut et les cheveux coupés tombaient maintenant sur le visage de la jeune femme toujours en larmes. On lui bousculait la tête, l’orientant dans tout les sens pour permettre à la « coiffeuse » de bien raser les cheveux partout, autour des oreilles, sur le front, les tempes, encore la nuque. Le moteur de la tondeuse se tut, la grosse femme lâcha un laconique « ok » et ramassa son matériel. Le policier tenant toujours Agnès par les poignets la fit se lever et la ramena dans le bureau d’entrée. Elle avait des cheveux coupés encore collés partout sur son visage et ses épaules. Le policier lui donna un exemplaire de l’amende et lui indiqua la porte.

A l’extérieur Cathy attendait son amie et les deux jeunes femmes tombèrent dans les bras l’une de l’autre.

 

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